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La fable du bitcoin virginal

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Des bitcoins sont considérés comme « vierges » lorsque qu’ils n’ont aucun historique de transaction, ce qui, spéculent certains, pourrait leur donner davantage de valeur. Dans un article publié hier sur Coindesk, Nic Carter [1] démontre qu’il n’existe pas véritablement de bitcoins vierges ni aucun marché dédié à de tels actifs. « Les mineurs que je connais me disent qu’ils n’ont jamais rencontré d’acheteurs prêts à payer une prime pour des bitcoins vierges. Mais admettons qu’une telle prime puisse émerger […] – par exemple pour des bitcoins dont il est prouvé qu’ils ont été extraits par des énergies renouvelables – l’authentification de ces unités serait beaucoup plus compliquée que certains pourraient le penser. Les pools

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Des bitcoins sont considérés comme « vierges » lorsque qu’ils n’ont aucun historique de transaction, ce qui, spéculent certains, pourrait leur donner davantage de valeur. Dans un article publié hier sur Coindesk, Nic Carter [1] démontre qu’il n’existe pas véritablement de bitcoins vierges ni aucun marché dédié à de tels actifs.

« Les mineurs que je connais me disent qu’ils n’ont jamais rencontré d’acheteurs prêts à payer une prime pour des bitcoins vierges. Mais admettons qu’une telle prime puisse émerger […] – par exemple pour des bitcoins dont il est prouvé qu’ils ont été extraits par des énergies renouvelables – l’authentification de ces unités serait beaucoup plus compliquée que certains pourraient le penser.

Les pools altèrent la virginité

La quasi-totalité de l’exploitation minière se fait par le biais de pools. Seuls 144 blocs sont émis chaque jour sur Bitcoin et les coopératives permettent aux mineurs de lisser l’aléa de leur découverte. Sur la blockchain, l’exploitation groupée apparait comme une transaction unique à destination d’une entité, suivie de transactions de distribution (généralement regroupées) vers des mineurs individuels. Dans certains cas le fruit du minage est mis en commun directement sur une plateforme d’échange qui crédite ensuite les mineurs. Ainsi, la mise en commun introduit un ou plusieurs sauts dans le processus de transfert vers les mineurs. Chaque transaction successive, en particulier lorsque plusieurs parties sont impliquées, augmente le “risque” de “souiller” ces bitcoins. Ainsi, le mode d’exploitation habituel ne convient pas pour produire des bitcoins vierges. 

Les frais contaminent les nouveaux bitcoins générés

Admettons qu’un mineur [suffisamment fort pour ne pas craindre la variance] choisisse de se passer des pools et de miner seul. Un autre problème apparait : Les mineurs ne sont pas rémunérés uniquement sur la base de l’émission de nouvelles pièces (6,25 BTC par bloc). Ils collectent également des frais auprès des utilisateurs enchérissant pour l’espace des blocs. Au cours des six derniers mois, les mineurs ont collecté 10 à 25% de leurs revenus grâce à ces frais qui proviennent d’unités déjà en circulation. Si des fractions de bitcoin non vierges sont considérées comme contaminées, les frais contaminent les nouveaux bitcoins générés.

Bien sûr, les mineurs pourraient toujours créer une liste blanche et n’accepter que les transactions et les frais d’acteurs de confiance. Mais en limitant les transactions qu’ils acceptent à ces acteurs identifiés, ils réduisent considérablement leurs opportunités de revenus. Les opérateurs de la liste blanche n’auraient qu’à enchérir les uns contre les autres, et non contre l’ensemble des utilisateurs, on peut donc s’attendre à des frais beaucoup moins élevés. Ainsi, imposer une liste blanche aux mineurs est économiquement préjudiciable, à moins que l’hypothétique prime payée par les acheteurs de bitcoins vierges l’emporte sur la baisse des revenus issus des frais. Au fil du temps, les frais finiront par déplacer complètement la subvention globale dans la composition des revenus des mineurs, de sorte que les pools ou les mineurs qui pratiquent une telle sélection seront probablement de moins en moins rentables.

Les transferts nuisent à l’identification des bitcoins vierges

Admettons que vous ayez surmonté les défis précédents. Vous faites alors face à un nouveau problème : comment transférer vos bitcoins identifiés comme vierges à un acheteur ? […] Si vous souhaitez réellement transférer des clés privées sans faire de transaction sur la blockchain, vous devez utiliser un système complexe tel que les statechains. Mais le protocole est encore expérimental et en grande partie non testé. 

L’absence d’historique des transactions, qui donne leur force aux bitcoins vierges, est un inconvénient majeur. Quand vient le temps d’utiliser réellement ces bitcoins, vous êtes paralysé. Les déplacer, c’est altérer la qualité qui les distingue. 


Bitcoin n’a pas d’unité individuelle

Les unités individuelles de Bitcoin ne sont qu’une vue de l’esprit. Bitcoin est un système d’UTXO [2], ce qui signifie que le protocole Bitcoin gère des quantités plutôt que des unités spécifiques de bitcoin. Les UTXO doivent être comprises comme des récipients contenant des quantités variables de bitcoin. Lorsqu’une UTXO est dépensée, le récipient est vidé dans de nouvelles UTXO. Pensez-y comme si vous versiez de l’eau de quatre verres dans six – la quantité d’eau reste la même, mais vous n’avez aucun moyen de savoir de quel verre provient (ou vers quel verre arrive) telle ou telle molécule d’eau.

Un prédécesseur de Bitcoin, Digicash de David Chaum, était en revanche un système semblable aux espèces, dans la mesure où les unités individuelles étaient conservées. Digicash traçait des “factures” avec l’équivalent de codes de série, dans des dénominations prédéterminées et fixes. Comme pour les transactions en espèces, pour atteindre un seuil spécifique pour une dépense, vous deviez sélectionner les factures de la bonne taille (ou qu’on vous renvoie la monnaie).

Bitcoin, en revanche, n’a pas de dénomination fixe et les unités n’ont pas de persistance. Les UTXO sont consommées à chaque transaction. Vous ne pouvez pas suivre une quantité spécifique de bitcoin via une transaction coinjoin avec 50 entrées et 50 sorties ; c’est comme des lingots d’or fondus et reformés à chaque transfert. Le protocole Bitcoin permet de s’assurer que les utilisateurs ne dépensent pas plus que les fonds qu’ils ont le droit de dépenser, mais il ne se soucie pas vraiment d’identifier les unités dépensées. Le philosophe Craig Warmke présente clairement ce cas dans son article sur les “Electronic Coins”.

Ainsi, même si certaines unités sont présentées comme “propres”, “vertes” ou “virginales”, ces unités spécifiques perdent leur identité dès qu’elles commencent à circuler. Les bitcoins vierges pourraient tout au plus être appelés bitcoins “stériles” – car dans cet état ils sont sans pouvoir puisqu’ils ne peuvent pas réellement circuler. Dès qu’ils le font et sont insérés dans le mélange chaotique et bouillonnant des UTXO, ils ne sont plus qu’une quantité indifférenciée de bitcoin.

Le moyen le plus infaillible pour acquérir des pièces “propres” c’est de faire appel à la bénédiction rédemptrice d’une autorité supérieure, qui, tel Saint Jean Baptiste, a le pouvoir de les débarrasser de leurs souillures. Lorsque le gouvernement américain vend des bitcoins saisis dans le cadre de la vente aux enchères de l’US Marshall, il n’y a aucun doute quant à leur authenticité et leur origine. Après tout votre homologue c’est le gouvernement américain ! Ainsi, les bitcoins de Silk Road que Tim Draper a achetées à l’État sont les plus propres de tous.

Source : coindesk.com


[1] Associé chez Castle Island Ventures, Nic Carter a cofondé Coin Metrics. Il anime également le podcast On The Brink avec Matt Walsh et assure une chronique pour le magazine Coindesk.

[2] UTXO (Unspent transaction output) : sortie de transaction non dépensée.

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